Mis à jour le 21 janvier 2023 par Tatiana75
Si vos recherches sur l’investissement immobilier vous ont déjà conduit sur un blog promettant un enrichissement rapide grâce à la pierre, vous avez certainement noté que le choix de la location saisonnière apparaît en bonne place aux côtés de la colocation. Ce serait le meilleur moyen d’obtenir le saint-graal : une rentabilité à deux chiffres, et bien entendu, un cash-flow plus que positif.
Quiconque a déjà loué un appartement pour une courte durée (qui plus est, dans une station balnéaire à la haute saison) sait que cela revient plus cher à la nuit qu’une location classique. Est-ce pour autant si intéressant que cela pour un propriétaire ? Quels sont les avantages et les points d’attention ? Nous allons détailler cela dans cet article !
Location saisonnière : quels avantages ?
Plus de flexibilité
Tout d’abord, le premier avantage de l’investissement dans la location saisonnière me semble être la flexibilité. Là où un bail d’habitation classique vous engage pour au moins 1 an et ne vous permet de récupérer votre bien que dans des cas très précis, la location saisonnière vous laisse la pleine maîtrise. Vous pouvez choisir la durée de location et n’êtes pas contraint d’ouvrir l’agenda de réservation sur toute l’année. Vous voulez profiter de votre appartement à la mer en août et le louer le reste de l’année ? C’est possible ! Il peut donc s’agir d’un très bon moyen de rentabiliser votre résidence secondaire.
Plus de revenus
Autre avantage de l’investissement en location saisonnière sur la location classique : cela rapporte généralement plus d’argent. Mais combien ? Trouver des études comparatives fiables, qui ne sont pas réalisées par une société tentant de vendre un service (généralement de la conciergerie), n’est pas évident. MeilleursAgents et le Journaldunet s’y étaient attelés il y a quelques années. En se limitant aux studios et 2 pièces de moins de 50 m² dans les quartiers touristiques de Paris, le rapport entre location Airbnb et location classique allait de 3 à 3,5.
9 à 10 nuits de location saisonnière étaient nécessaires pour générer l’équivalent d’un mois de loyer en location classique. Dans les quartiers peu touristiques, la location saisonnière ne rapportait « que » 2 fois plus que la location classique. Les chiffres datent néanmoins de 2015.
Plus récemment, un article publié par Le Monde indiquait, en se basant sur les chiffres de la plateforme AirDNA, que le prix moyen d’une nuitée dans un logement entier avait augmenté de 16,4% en France entre août 2018 et août 2022. Cette moyenne cache bien entendu des disparités. Si les prix ont reculé de 7,5% à Tourcoing, ils auraient augmenté de 61% à Paris..!
L’exemple de Paris
A Paris, le tarif moyen en septembre 2022 serait ainsi de 248 €. Quant au taux d’occupation, BFM Immo indiquait en mai 2022 (toujours en se basant sur les statistiques d’AirDNA), qu’il atteignait 74,3%. En prenant l’exemple d’un investisseur qui chercherait à louer toute l’année, ses revenus annuels bruts s’élèveraient donc à 67 256 €, soit 5 604 € par mois. Le montant peut faire rêver mais reste évidemment à prendre avec des pincettes. Le tarif de 248 € est tout d’abord une moyenne prise à un instant T.
En tentant de chercher sur Airbnb quel genre d’appartement se louait à 248 € la nuit (histoire de comparer plus précisément à ce qui pourrait être facturé en location classique), le site m’indique que pour la nuit recherchée (le samedi 18 mars 2023), le prix moyen s’élève à 195 € pour un logement entier pour 2 personnes. Les revenus mensuels chuteraient alors à 4 419 €.
Essayons alors de limiter le périmètre aux 2 pièces. En sélectionnant, toujours sur le 18 mars, des 2 pièces classiques (c’est-à-dire qui ne sont pas dans des quartiers très touristiques ou avec des vues exceptionnelles), les tarifs hors frais de ménage et de service vont de 90 € à 140 €. Si on fait la moyenne entre les annonces, nous arrivons à 116 €. Avec le taux d’occupation de 74,3%, les revenus annuels bruts seraient de 31 458 €, soit 2 621 € par mois.
Qu’en est-il en location classique ? D’après une étude réalisée par Franceinfo en février 2022 (basée sur les chiffres de SeLoger), le loyer moyen d’un 2 pièces non meublé à Paris est de 1 292 € par mois. Les 2 pièces meublés n’ont pas été étudiés mais d’après SeLoger, la différence de loyer entre meublé et non meublé serait de 14%. Un T2 meublé se louerait donc 1 472 € par mois. La location saisonnière rapporterait alors 1,8 plus que la location meublée classique et 2 fois plus que la location non meublée. Les ratios sont ainsi proches de ceux obtenus en 2015 dans les quartiers peu touristiques.
Cette étude étant très partielle, n’hésitez pas à me partager les chiffres que vous pourriez avoir dans d’autres villes, cela peut intéresser du monde ! Et avant de vous ruer sur l’acquisition d’un bien pour « faire du Airbnb », attendez de lire la seconde partie sur les risques – et les frais – à prendre en compte.
Location saisonnière : les points d’attention
Une gestion chronophage…ou des frais de gestion élevés
Pour garder un lien avec les revenus générés par la location saisonnière, parlons des frais entraînés par sa gestion. Les montants évoqués en première partie sont bien entendu bruts. Avec une location classique, sauf problèmes particuliers, la gestion sera peu prenante. Cela vous demandera du travail essentiellement aux arrivées et départs des locataires. Sauf sur les petites surfaces destinées aux étudiants où le turn-over sera plus fréquent, les locataires peuvent rester plusieurs années.
En revanche, en location saisonnière, les occupants resteront une ou deux semaines dans le meilleur des cas, voire seulement une ou deux nuits. Vous pouvez refuser les locations pour des durées très courtes mais cela vous fera passer à côté de clients potentiels.
Avant chaque nouvelle location, il faudra faire le ménage, changer les draps, réapprovisionner les produits de première nécessité… Sauf à installer un boîtier connecté permettant aux locataires de récupérer et laisser les clés (sachant qu’il vous faudra l’autorisation de la copropriété pour l’installer dans les parties communes, ce qui peut s’avérer compliqué, vos voisins ne voulant certainement pas favoriser les va-et-vient allant de pair avec la location saisonnière), vous devrez vous déplacer pour les arrivées et les départs.
Mieux vaut alors ne pas vivre trop loin, être flexible, aimer faire le ménage et des machines de draps. Et évidemment, il vous faudra gérer votre calendrier de location, accepter ou refuser les demandes, répondre aux messages, régler les problèmes éventuels pendant le séjour tels que les coupures de Wi-Fi où les plombs qui sautent.
Bien entendu, il est possible de déléguer cette gestion à un professionnel. Les conciergeries pullulent depuis plusieurs années dans les villes un minimum touristiques. Leurs frais s’élèvent en moyenne à 20% des des loyers encaissés. Si nous reprenons l’exemple du T2 parisien, le bailleur toucherait 2 097 € de loyer après paiement des frais, ce qui fait 625 € de plus que le loyer brut en location classique.
La réglementation et ses évolutions
Au niveau de la réglementation, plusieurs points sont à étudier avant d’envisager un investissement en location saisonnière.
Location saisonnière et copropriété
Tout d’abord, si votre bien se situe dans une copropriété, attention au règlement. Certains interdisent expressément la location saisonnière. Vous pourrez demander la modification de ce point en assemblée générale mais l’unanimité est requise. De même, si votre lot est affecté à un usage d’habitation dans le règlement, vous devrez obtenir l’autorisation de modifier cette affectation par l’unanimité. Ce changement ne peut toutefois vous être refusé si le règlement autorise la location saisonnière ou si un autre copropriétaire l’exerce déjà (légalement).
Même si le règlement est muet sur ce sujet, votre activité ne sera pas automatiquement autorisée pour autant. S’il contient une clause d’habitation bourgeoise exclusive, vous ne pourrez en principe pas louer en meublé touristique, cette activité étant considérée comme commerciale. En revanche, si le règlement autorise les activités commerciales, la location saisonnière sera normalement acceptée.
Attention au cas des immeubles mixtes (c’est-à-dire autorisant les professions libérales telles que les avocats ou les médecins). Si la Cour de cassation s’était montrée plutôt permissive par le passé, elle a durci sa position en 2018 en considérant que la rotation de courtes périodes de location n’est pas compatible avec la destination de ces immeubles.
Même si l’activité est autorisée, vous n’êtes pas à l’abri d’une plainte pour « trouble anormal de voisinage » si vos locataires s’avèrent bruyants. Au-delà des soirées, si votre bien se loue généralement une ou deux nuits, le passage incessant de touristes parlant fort dans les parties communes et le bruit des valises à roulette peut gêner vos voisins. Sans parler des dégradations des parties communes.
Le trouble anormal doit toutefois être constaté par un huissier avant mise en demeure et éventuelle action en justice. Si l’issue reste très incertaine, des condamnations pour ce motif ont déjà été prononcées, notamment par la Cour d’appel de Paris (décision n°21/10676 du 11 février 2022, voir cet article de Village-Justice pour l’analyse complète).
Avec une maison, vous serez tranquille sur la partie copropriété mais vos voisins pourront tout de même se plaindre de trouble anormal de voisinage en cas de bruit excessif.
Location saisonnière et réglementation locale
La copropriété ne sera pas la seule à vous mettre des bâtons dans les roues : la ville y met aussi généralement du sien. Constatant que l’essor de la location saisonnière pouvait contribuer à assécher le marché locatif classique, certaines municipalités ont décidé de la restreindre, notamment dans les zones tendues. Avant d’investir, renseignez vous bien sur la réglementation locale et ses évolutions potentielles.
La loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique, renforcée par la loi ELAN en 2018, autorise en effet les villes de plus de 200 000 habitants et les communes du 92, 93 et 94 à contraindre les loueurs saisonniers à s’enregistrer à la mairie sous peine d’amende. Tout le monde est concerné, même les personnes voulant louer leur résidence principale dans la limite des 120 jours par an. La déclaration permettra dans ce cas simplement à la mairie de vérifier que vous n’excédez pas cette durée de location grâce au numéro d’enregistrement qui vous sera attribué.
A Paris, la réglementation s’est fortement durcie ces dernières années. La location saisonnière n’est possible que pour votre résidence principale dans la limite des 120 jours, sauf à obtenir une autorisation de changement d’usage. Précisons que pour transformer un logement en meublé touristique, vous devrez respecter les règles de compensation en transformant en contrepartie un autre local commercial de même surface (voire 2 à 3 fois plus grand selon le secteur) en habitation. Et bien entendu, il n’est pas question d’offrir un logement dans le 19ème en échange d’une transformation dans le 8ème : les biens doivent être situés dans le même quartier.
La petite astuce bien connue de ces dernières années qui consistait à acheter un local commercial pour le transformer en location saisonnière sans changement d’usage ne fonctionne plus depuis 2021. La mairie impose désormais de demander une autorisation.
Une incertitude semble cependant demeurer pour la transformation de bureaux en appartements saisonniers. Elle pourrait se faire sans autorisation. Ian Brossat, adjoint au logement de la mairie de Paris, déclarait en 2021, après le passage de la réglementation sur les locaux commerciaux : « Le dernier sujet, ce sont les immeubles de bureaux. Mais là-dessus, nous n’avons aucune marge de manœuvre. »
Je ne trouve toutefois pas vraiment d’informations concrètes sur le site de la mairie (ce qui n’est guère étonnant, ils ne veulent certainement pas attirer l’attention sur cette possibilité si elle existe vraiment). Si vous en savez plus, n’hésitez pas à le partager en commentaire.
Location saisonnière et fiscalité
Comme pour la location meublée classique, les revenus générés seront imposés au titre des Bénéfices Industriels et Commerciaux (BIC). Là également, vous aurez le choix entre le régime réel et le micro-BIC. Pour ce dernier, vous bénéficierez d’un abattement de 50% sur les revenus perçus. Il n’est toutefois accessible que si ces revenus sont inférieurs à 72 600 € par an. Selon votre situation, vous serez considéré comme un loueur en meublé professionnel (LMP) ou non professionnel (LMNP). Je vous renvoie à l’article que j’avais rédigé sur le LMNP pour plus de détails. Les règles sont en effet les mêmes que pour la location meublée classique.
La fiscalité sera différente si votre logement est classé « meublé de tourisme », s’il s’agit d’un gîte rural ou une chambre d’hôtes. Vous pourrez dans ce cas bénéficier du régime forfaitaire si vos recettes ne dépassent pas 176 200 € par an et surtout, l’abattement passe de 50% à 71%. Pour faire classer votre logement, vous devrez faire appel à un organisme de contrôle accrédité, qui viendra visiter votre bien avant de décider de le classer ou non.
Outre les impôts sur vos revenus, vous serez également redevable des taxes suivantes :
- Taxe de séjour : à collecter auprès de vos locataires puis à reverser à la mairie.
- Taxe foncière,
- Taxe d’habitation, sauf à prouver que vous n’utilisez jamais le logement pour votre propre usage.
- Cotisation Foncière des Entreprises (CFE), sauf si votre CA ne dépasse par 5 000 €, si votre commune exonère les logements classés ou si vous occupez périodiquement le logement. La taxe d’habitation et la CFE ne sont donc logiquement pas cumulables.
En outre, si les revenus générés par la location excèdent 23 000 €, vous serez considéré comme un professionnel et redevable des charges sociales (17,2% du montant imposable). Attention donc si vous flirtez avec la limite. Il vaut peut-être mieux se passer de 2 ou 3 locations que de payer des charges, d’autant plus que le forfait minimum se chiffre à 1 145 €. Pour plus d’informations, vous pouvez consulter le site de l’URSSAF.
Location saisonnière : les risques
Avant de conclure, passons en revue les principaux risques liés à l’investissement en location saisonnière. Tout d’abord, et c’est souvent le premier point auquel on pense, les biens loués en saisonnier se dégradent généralement plus rapidement que les logements loués à l’année. La plupart des gens font en effet plus attention quand ils sont « chez eux ».
Votre location saisonnière est également sûrement optimisée pour accueillir plus d’occupants qu’un logement classique. Un T2 pourra ainsi facilement abriter 4 touristes là où vous l’auriez loué à une ou 2 personnes en longue durée. Les équipements étant plus utilisés, ils s’usent en toute logique plus vite. Pensez donc à bien provisionner régulièrement des petits travaux / renouvellement de mobilier dans votre business plan.
Un autre risque peut se situer au niveau de la saturation de l’offre dans certaines zones. Nous l’avions déjà évoqué pour la colocation. Quand un créneau est porteur, le danger est que tout le monde s’y engouffre. Etudiez bien le marché et là encore, n’hésitez pas à recourir à l’annonce fictive. Si l’offre concurrente est abondante, il faudra vous démarquer. Et surtout, contrairement à la location classique, n’oubliez pas que sur la plupart des plateformes, vos locataires pourront vous noter. Attention donc, les mauvais commentaires peuvent arriver au moindre petit problème.
Enfin, les revenus issus de la location saisonnière sont généralement plus irréguliers qu’en location classique et davantage soumis aux éléments extérieurs. Sans reparler du Covid, une absence de neige l’hiver mettra en péril votre location à la montagne. Surtout, et nous l’avons bien vu à Paris, un changement de réglementation peut mettre fin à votre activité (du moins, légalement, mais ce n’est pas moi qui vous conseillerais de vous mettre dans l’illégalité). Préparez alors peut-être également un business plan en location classique, histoire de voir si vous ne perdriez pas trop d’argent si vous deviez envisager une reconversion.
Conclusion : la location saisonnière, on y va ou pas ?
J’ai envie de vous faire une réponse de Normand en vous disant « ça dépend » (ne me remerciez pas). Plus sérieusement, si l’investissement en location saisonnière s’avère rentable malgré les frais de gestion (ou si vous êtes prêt à gérer vous-même) et qu’une location classique le serait également, vous ne prenez pas trop de risques. Sous réserves, bien entendu, que la réglementation municipale et la copropriété vous y autorise. De même, sans parler de rentabilité, si vous cherchez seulement à gagner un peu d’argent avec une résidence secondaire. Ou une future résidence principale si vous prévoyez par exemple de vous installer dans le bien à la retraite.
Le mix location étudiante de septembre à juin et location saisonnière l’été peut également être une option intéressante selon la ville.
En revanche, j’émettrais des réserves si le bien se situe dans une zone saturée en offres de locations touristiques et/ou si un passage vers la location classique s’avérait peu judicieux en cas de changement de réglementation. Ce serait quand même dommage de vous retrouver sans revenus au bout d’un an alors que vous deviez gagner 1 500 € par mois. Egalement, ne sous-estimez pas le pouvoir de nuisance de vos voisins. Si le règlement de copropriété interdit la location saisonnière, n’achetez pas en vous disant que vous arriverez à les convaincre ou en espérant pouvoir le faire dans leur dos sans vous faire prendre.
J’ai conscience que les exemples chiffrés dans l’article sont très partiels car basés sur Paris mais manquant de temps (et un peu d’envie car ce n’est quand même pas une activité très marrante) pour chercher des chiffres partout en France, n’hésitez pas à partager en commentaire vos propres exemples !
Et si l’envie vous prend d’acheter le magnifique tapis figurant sur la photo de l’illustration pour attirer les touristes chez vous, sachez que vous pouvez vous le procurer chez le célèbre leader chinois connu pour ses produits de bon goût. Vous pourrez même le compléter d’un kit complet pour la salle de bains (dont je vous ai fait grâce, et là vous pouvez me remercier) ou d’un paillasson. Attention tout de même pour ce dernier : les inspecteurs de la mairie de Paris ont déjà grillé des locations illégales en se basant sur la présence de paillassons Tour Eiffel !