Mis à jour le 30 juillet 2023 par Tatiana75
Continuons sur la lancée des étapes de l’acquisition immobilière avec l’avant-contrat, plus communément appelé « compromis ». Ce dernier ne représente en réalité qu’un seul type d’avant-contrat, le plus couramment utilisé. D’autres types d’engagements peuvent être signés. Quelles sont leurs caractéristiques et les précautions à prendre pour se protéger ? On en parle tout de suite !
Les différents types d’avant-contrats
Légalement, l’avant-contrat n’est pas obligatoire pour acheter un bien immobilier. Il est ainsi possible de signer directement un acte de vente. Dans les faits, les parties préfèrent quasi-systématiquement en passer par cette étape. L’avant-contrat permet en effet de préparer et de sécuriser la vente, en répondant notamment à toutes les questions juridiques qui pourraient se poser.
3 types d’avant-contrats peuvent être signés :
Le compromis (ou promesse synallagmatique de vente)
C’est le type d’avant-contrat le plus fréquemment rencontré. L’acheteur et le vendeur s’engagent à mener la transaction à bien, au prix convenu, sauf exercice du droit de rétractation ou réalisation d’une condition suspensive. En dehors de ces cas, la signature du compromis vaut vente. Si l’une des parties se désiste, l’autre pourra la contraindre à vendre ou acheter par voie de justice. Il s’agit donc de l’avant-contrat offrant le plus de sécurité pour les deux parties.
La promesse unilatérale de vente
Avec ce contrat, le vendeur s’engage à vendre à un acquéreur, qui lui ne s’engage pas à acheter. Il lui accorde ainsi une sorte d’exclusivité pendant un certain délai. En contrepartie de l’engagement du vendeur, l’acheteur devra généralement verser une indemnité d’immobilisation. Celle-ci sera conservée par le vendeur si l’acquéreur décide de ne pas poursuivre la vente. Mais cette indemnité reste facultative. La promesse unilatérale de vente peut donc être intéressante si l’acheteur n’est pas certain de vouloir acquérir le bien. Il pourra alors se rétracter en perdant « juste » son indemnité dans le cas où il en aurait versé une.
La promesse unilatérale d’achat
Ici, seul l’acquéreur s’engage à acheter. Moins fréquente, elle ne se rencontre que dans certains cas particuliers. Cela peut être quand l’acheteur a eu un coup de cœur sur un bien que le vendeur n’est pas certain de vouloir vendre. Ou encore si le vendeur est sous tutelle et doit attendre une décision du juge pour vendre. Compte-tenu de sa rareté, nous n’en parlerons pas plus en détail ici.
Comment rédiger l’avant-contrat ?
Nous nous pencherons ici essentiellement sur le compromis, s’agissant du cas le plus fréquemment rencontré.
Qui rédige le compromis ?
L’avant-contrat peut être rédigé de 3 manières : par acte authentique (via un notaire), par acte sous seing privé via un tiers (agent immobilier généralement), ou directement entre vendeur et acquéreur.
Le notaire
Confier la rédaction d’un contrat à un professionnel du droit est bien entendu l’option la plus sécurisée mais ce n’est pas obligatoire (sauf dans le cas où un délai de plus de 18 mois est prévu entre la signature du compromis et de l’acte de vente).
Bon à savoir : selon la localisation du bien, les délais pour finaliser le compromis peuvent être longs, les notaires étant débordés. Il faudra donc s’armer de patience. Usuellement, le notaire de l’acquéreur se charge de la rédaction. Le vendeur peut toutefois se faire assister de son propre notaire. Les frais seront alors partagés entre les deux professionnels. Cela ne double donc pas les honoraires.
Même si les notaires sont tenus à une obligation de conseil et d’impartialité, mieux vaut donc toujours s’adjoindre les services du vôtre. Cela ne coûtera pas plus cher. Faire rédiger le compromis par un notaire coûtera entre 150 et 300 € selon l’office notarial. L’acquéreur devra généralement régler ces frais mais il est possible de prévoir un partage ou une prise en charge par le vendeur. Si vous choisissez le même notaire pour signer l’acte authentique (ce qui est tout de même le plus simple), il intégrera généralement le coût aux frais globaux, voire vous dispensera d’honoraires sur la rédaction du compromis.
L’agent immobilier
Si la vente s’effectue via une agence, l’agent immobilier s’occupera très probablement de la rédaction du compromis. La signature interviendra généralement beaucoup plus rapidement que via un notaire. L’agent immobilier étant rémunéré au moment de la vente, il a tout intérêt à ce que celle-ci se fasse au plus vite.
Il se chargera également de toutes les formalités administratives rébarbatives, notamment de récupérer les diagnostics et les documents relatifs à la copropriété. Tout ceci étant intégré dans sa commission, autant ne pas vous en passer.
Toutefois, même s’il s’agit d’un professionnel censé maîtriser l’art de la rédaction du compromis (ou la reprise des modèles types, surtout s’il s’agit d’un gros réseau), cela ne doit pas vous dispenser de relire attentivement l’avant-contrat et de vous faire préciser les points qui ne vous semblent pas clairs.
Comme avec un notaire, l’agent immobilier versera votre acompte sur un compte séquestre.
Rédaction par les deux parties
Même si cette solution est juridiquement possible, elle reste peu conseillée, sauf si les deux parties ont des compétences particulières en la matière. L’oubli de certaines pièces ou mentions risque en effet de reporter le point de départ du délai de rétractation de l’acquéreur. Elle pose en outre le problème du versement de l’acompte, qui devra s’effectuer directement sur le compte de vendeur, et non sur un compte séquestre. Si la vente ne se fait pas à cause, par exemple, de la non-réalisation d’une condition suspensive, cela peut générer des problèmes si le vendeur refuse de le restituer.
Acompte : quel montant ?
Cela nous amène à la question de l’acompte. Contrairement à une idée répandue, il est nullement obligatoire. Il reste néanmoins généralement exigé par le vendeur. Ce qui peut se comprendre. Sans acompte, si l’acquéreur se désiste sans motif au-delà du délai de rétractation, le vendeur n’aura pas d’autres options que d’engager une procédure judiciaire pour se faire indemniser ou pour forcer la vente. En présence d’acompte, il peut choisir de se contenter de le conserver à titre d’indemnité plutôt que d’entamer une procédure longue pour imposer la vente.
L’acompte n’étant pas obligatoire, son montant n’est pas encadré. Les vendeurs demandent généralement 5 ou 10% du prix de vente. Cette somme sera versée par virement sur le compte séquestre du notaire ou de l’agent immobilier et sera déduite de la facture finale. Il ne vous sera souvent demandé qu’après l’expiration du délai de rétractation. En cas de vente entre particuliers, le vendeur ne disposant pas de compte séquestre, il ne pourra recevoir l’acompte avant l’expiration de ce délai.
Droit de rétractation : qui peut y avoir recours ?
L’article L271-1 du Code de la construction donne en effet la possibilité aux particuliers souhaitant acquérir un bien à usage d’habitation de se rétracter sans motif dans un délai de 10 jours. Les professionnels ne sont pas concernés.
Attention donc au cas de la SCI. La possibilité de se rétracter dépendra de l’objet social de cette dernière. Si celui-ci porte, par exemple, sur « l’acquisition, l’administration et la gestion par location de tout immeuble et biens immobiliers », l’acquéreur sera considéré comme un professionnel. S’il mentionne simplement l’acquisition de la résidence principale d’un couple de particuliers, nous pourrions penser que la rétractation serait possible. Dans un arrêt du 16 septembre 2014, la Cour de Cassation en a toutefois décidé autrement en considérant que dans la mesure où l’objet social de la SCI portait sur l’acquisition d’immeubles, l’opération entrant dans ce cadre, il s’agissait d’un acte professionnel.
Si vous souhaitez acheter via une SCI tout en bénéficiant du délai de rétractation, mieux vaut donc signer en votre nom propre et intégrer dans le compromis une clause de substitution qui vous permettra de modifier le nom de l’acquéreur final jusqu’à la signature de l’acte de vente. Cela peut également être utile si vous n’avez pas encore constitué votre SCI. Et si vous ignorez ce qu’est une SCI, je vous renvoie vers cet article.
Point de départ du délai
Le délai de 10 jours se compte en jours calendaires et commence à courir le lendemain de la première présentation de l’envoi du compromis par LRAR, ou le lendemain de sa remise en main propre. L’envoi par recommandé est obligatoire si la vente se fait directement entre particuliers. Si vous n’allez pas chercher le recommandé, le délai court tout de même. N’espérez donc pas jouer la montre. Si vous achetez à plusieurs, le compromis devra être envoyé à chaque acquéreur.
S’il manque des pièces obligatoires annexes au compromis (diagnostics, documents relatifs à la copropriété…), le délai de 10 jours ne partira qu’à compter de la réception des pièces manquantes. Si le compromis passe par un notaire ou un agent immobilier, la signature ne se fait normalement qu’au moment où le dossier est complet mais ce n’est pas forcément le cas lors d’une vente entre particuliers. Faites-y donc bien attention.
Pour vous désister, il faudra envoyer également un courrier par RAR. Vous n’avez pas de justification à donner. En présence de plusieurs acquéreurs, la rétractation exercée par l’un d’entre eux vaut normalement pour tous mais mieux vaut faire signer le courrier à tout le monde.
Si vous aviez déjà versé l’acompte, celui-ci devra vous être restitué dans un délai de 21 jours.
Bon à savoir : seul l’acquéreur peut se rétracter. Le vendeur est donc totalement engagé dès la signature du compromis.
Quelles clauses insérer ?
Nous l’avons vu, le compromis vaut engagement de mener la vente à bien. En dehors du droit de rétractation, l’acquéreur peut revenir sur son engagement si certaines conditions ne sont pas remplies. Celles-ci doivent faire l’objet de la fameuse condition suspensive dont on entend souvent parler.
La condition suspensive d’obtention de prêt
La plus connue d’entre elles porte sur le financement. Elle est obligatoire en présence d’un acquéreur non-professionnel qui souhaite avoir recours à un crédit pour acheter un bien à usage d’habitation, mixte, ou un terrain sur lequel il compte édifier un immeuble d’habitation ou mixte. Elle permet à l’acquéreur qui n’arrive pas à obtenir de prêt de se rétracter et de récupérer son acompte.
La clause doit être limitée dans le temps (généralement 2 mois). Il faut également mentionner le montant à emprunter, la durée et le taux d’intérêt maximal. Ce point doit être bien réfléchi. A défaut de mention, vous ne pourrez pas refuser d’acheter si vous n’avez que des propositions à un taux de 4%. Et s’il s’avère que vous avez sollicité des prêts pour un montant supérieur à celui mentionné dans le compromis et que ceux-ci vous ont été refusés, vous serez considéré comme fautif, les clauses du contrat n’ayant pas été respectées.
Attention aussi au nombre de banques à solliciter. La loi n’impose pas de nombre minimum ou maximum de banques à interroger. Le compromis peut par contre le préciser. Si vous êtes côté vendeur, prêtez une attention particulière à ce point. Selon la formulation, votre acquéreur pourra se rétracter avec un seul refus. Mieux vaut donc, par exemple, prévoir que la rétractation ne sera possible qu’en cas de refus de prêt de la part de 3 banques différentes.
Les autres conditions suspensives
En dehors de cette clause obligatoire dans les cas évoqués, d’autres conditions suspensives peuvent être intégrées. Petit tour d’horizon des plus courantes :
- Absence de servitude d’urbanisme ou d’utilité publique,
- Obtention de permis de construire ou d’un changement d’usage,
- Vente du logement actuel,
- Départ du locataire en place si le logement est loué.
De nombreuses autres clauses peuvent être envisagées selon la situation dans laquelle vous vous trouvez. Les conditions suspensives constituent la seule option de rétractation de l’acquéreur au-delà des 10 jours. Il faut donc bien réfléchir à toutes les découvertes qui pourraient être faites avant la signature de l’acte de vente et qui vous feraient renoncer à l’acquisition. Par exemple, est-ce que vous achèteriez une maison si vous découvriez que votre jardin était grevé d’une servitude de droit de passage pour vos voisins ? C’est une information que vous n’aurez pas nécessairement au stade du compromis. D’où l’utilité de vous faire assister par un notaire pour envisager tous les cas possibles.
Quels documents intégrer ?
Pour que l’acquéreur puisse prendre la décision d’acheter en toute connaissance de cause, un certain nombre de documents doivent être intégrés. Ces derniers pourront être soigneusement épluchés pendant le délai de rétractation. Idéalement, jetez-y quand même un œil avant de signer. Si vous ne pouvez pas bénéficier du délai de rétractation, ne jetez pas juste un œil..!
Le dossier des diagnostics techniques (DDT)
Ce dossier regroupe les diagnostics obligatoires suivant la situation de l’immeuble :
- Présence de plomb (pour les immeubles construits avant 1949),
- Amiante (si construction antérieure à 1997),
- Termites et mérules (selon la zone),
- Etat de l’installation de gaz (immeubles de plus de 15 ans),
- Etat de l’installation intérieure électrique (si elles datent d’il y a plus de 15 ans),
- Etat des risques naturels, miniers et technologiques,
- Et bien entendu, le fameux diagnostic de performance énergétique (DPE), sous le feu des projecteurs actuellement.
Le cas de la copropriété
Si le bien se situe dans une copropriété, les documents suivants devront être demandés au syndic par le vendeur s’il ne les possède pas et transmis à l’acquéreur :
- Règlement de copropriété, état descriptif de division et éventuels actes modificatifs,
- Procès-verbaux des assemblées générales des 3 dernières années,
- Fiche synthétique regroupant les informations techniques et financières relatives à l’immeuble,
- Carnet d’entretien de l’immeuble,
- Situation financière de la copropriété et du vendeur (montant des charges, impayés…)
Si l’acheteur est déjà propriétaire d’un lot dans la copropriété ou s’il n’achète qu’un lot annexe (cave, parking…), le vendeur sera dispensé de lui transmettre certains de ces documents.
Et après… ?
Tout est en ordre ? Vous ne vous êtes pas rétracté et avez obtenu votre prêt ? Prochaine étape, 3 mois environ après le compromis : la signature de l’acte authentique, que nous allons étudier dans le prochain article.